Quel modèle de société européen voulons-nous ?

Les institutions européennes sont un cadre, un contenant, un outil. Elles permettent aux nations de travailler ensemble, de se donner des règles communes, de définir une politique commune. Les politiques européennes définissent un contenu : des lois, des objectifs, des actions, qui ensemble aboutissent à un projet de société. La façon dont fonctionnent nos sociétés européennes, ce qui les caractérise, est plutôt du domaine du « référentiel », ce que l’on appelle le « modèle de société ». Y a-t-il un modèle de société européen, ou plusieurs avec un socle commun ? Quel modèle de société européen voulons-nous ?

L’expression « modèle de société » signifie deux choses :

1- D’une part la référence à un mode de fonctionnement de la société :

o       ses valeurs prioritaires (éthique, droits de l’homme, liberté de penser, de s’exprimer, d’entreprendre, respect et tolérance, protection des faibles,…) qui peuvent être clairement exprimées ou sous-jacentes dans l’expression du comportement social,

o       son organisation politique (démocratie, fédération de nations, gouvernance partagée avec principe de subsidiarité,…),

o       son organisation sociale (exercice de la solidarité collective par la redistribution fiscale, le niveau de protection sociale, les services publics).

2- D’autre part l’exemplarité, celle d’un système de valeurs et de fonctionnement qui peut être proposé comme modèle au monde. De sorte que cette organisation politique et sociale puisse être étendue mondialement, en espérant que les autres sociétés soient convaincues du bien fondé et de l’efficacité de ce modèle.

Il ne s’agit pas d’un « projet de société » qui se définit quant à lui dans l’action et dans l’avenir, avec des objectifs d’améliorations, des priorités d’action, pour passer d’un Etat à un autre de la société tant sur le plan économique que social et environnemental. Un projet de société peut consister notamment à faire évoluer ou changer profondément le modèle de société ! Dans ce cas, les actions envisagées sont plus structurelles, s’attaquent au cœur du système, à son moteur, à un changement de valeurs ou de priorités des valeurs, à des lois fondamentales du fonctionnement (par exemple passer d’une société capitaliste à une société socialiste, ou l’inverse, d’un système de dictature politique à une démocratie).

Quelles sont les caractéristiques du « modèle européen » ? En quoi est-il différent du modèle américain ?

Tout d’abord les nations d’Europe puisent dans leurs racines et leur histoire une culture et des valeurs qui forment un héritage commun : la Grèce antique, l’empire romain, le christianisme, les lumières, la république, sans oublier les parties plus sombres telles que le colonialisme et l’esclavage puis leur abrogation, les guerres sanglantes de religions ou guerres mondiales du XXème siècle puis les retours à la paix … Les Etats-Unis partagent cet héritage jusqu’à leur création puis l’incrémentent d’un autre qui leur est propre, fait de conquêtes de l’Ouest, de ruée vers l’or, de territoires, important dans la constitution de l’imaginaire collectif, l’entretien du rêve américain, du self-made-man, de la culture de la consommation, de même que dans le fonctionnement de l’économie.

On peut parler de « modèle de société  européen », dans la mesure où les Etats européens partagent en commun des valeurs, une histoire, une culture, un mode de gouvernance des Etats basé sur la démocratie,  un système économique basé sur le libre-échange et aussi un niveau de protection sociale et de services publics qui, s’il est encore inégal entre les Etats, converge de plus en plus pour assurer une solidarité entre les citoyens. Dans ce qui fonde notre modèle de société européen, il y a bien sûr les points de convergence entre nos sociétés, celles de chaque pays qui composent l’Europe, mais il y a aussi les valeurs et les règles de fonctionnement économiques et sociales que les pays ont décidé ensemble de graver dans le marbre pour leur communauté, constituant ainsi un acte de volonté dans la structuration d’un modèle commun, ainsi que les règles de solidarité entre Etats européens. Plus qu’un simple dénominateur commun entre les Etats, on observe bien un niveau supérieur de construction.

Si nous regardons les caractéristiques de fonctionnement social et économique, des différences notables peuvent être identifiées entre le modèle de société américain et le modèle européen (même si ce dernier comporte certaines variantes, notamment entre le modèle républicain français, le modèle rhénan allemand, le modèle nordique social démocrate avec sa flexisécurité,…) :

  • un niveau plus important de services publics, un rôle plus actif de l’Etat pour assurer une fonction de redistribution sociale et pour gérer des services publics,
  • une meilleure protection sociale (santé, retraites, chômage) à caractère obligatoire,
  • une école publique et des universités accessibles à tous, à frais d’inscription abordables,
  • de ce fait, des prélèvements obligatoires (impôts et cotisations sociales) supérieurs, pour financer les services publics et la protection sociale : peu plus de 50 % au Danemark et en Suède, 43% en France, de l’ordre de 35% en Allemagne et au Royaume Uni, contre de l’ordre de 25 % aux Etats-Unis.
  • un système de retraite par répartition (sauf dans des cas exceptionnels de l’Irlande ou du Royaume Uni), par opposition au système de retraite américain par capitalisation. Presque tous les pays européens ont un système de retraite par répartition obligatoire -basé sur des mécanismes de solidarité entre les générations – qui peut se présenter sous différentes formes, et auquel s’ajoutent d’autres systèmes, obligatoires ou non, générant des compléments de revenus individuels.
  • Un système plus soucieux de l’intérêt général et plus coopératif, par opposition à un système compétitif, que ce soit au niveau d’entreprises mutualistes, GIE (interbancarité française, banques et sociétés d’assurances mutuelles, coopératives agricoles …) ou au niveau européen, lorsque des entreprises ou des Etats mettent en commun des ressources pour œuvrer vers un objectif commun (EADS, Galileo, Ariane espace,…). L’Europe est en avance sur les autres pays quant aux initiatives visant la lutte contre le réchauffement climatique et les économies d’énergie, elle a signée les accords de Kyoto contrairement aux Etats-Unis. Ce qui constitue d’ailleurs un vrai scandale de la part d’un pays qui s’érige en arbitre de la planète dans bien des domaines, et refuse tout bonnement de s’appliquer à soi-même les préceptes qu’ils impose aux autres avec force leçons de morale.

Même si économiquement l’Europe fonctionne sur le principe du libre-échange, du libéralisme économique et de marché, elle a aussi des dispositifs de régulation. S’ils étaient insuffisants pour contenir les dérives (paradis fiscaux, dumping social, fiscal et environnemental des pays émergents,…), il faut œuvrer  pour leur amélioration et complémentation. Même si socialement il n’y a pas de salaire minimum européen, un niveau de services publics inégal selon des Etats européens, les pays de l’Union présentent en général un niveau assez élevé de protection sociale et de services publics. Les normes sociales dépendent du niveau de vie des Etats et doivent évoluer progressivement. Trop de rigidité risquerait de compromettre la solidarité.

Un modèle de société inachevé …

La construction européenne s’est réalisée au départ sur un projet commun coopératif, à la sortie de la seconde guerre mondiale, visant une garantie de la paix en Europe : la mise en commun du charbon et de l’acier. Les premiers promoteurs de l’Europe avaient en tête le « Plus jamais ça » à propos des guerres fratricides qui avaient déchiré le vieux continent. Progressivement, d’autres projets comme la PAC, l’euro, ont vu le jour et l’Europe s’est dotée de normes communes pour le bien de tous. Visant la prospérité économique, elle a surtout œuvré pour le libre échange et la stabilité financière. En revanche, elle n’a toujours pas mis en place de gouvernance économique commune, ni harmonisé une politique fiscale et sociale, ne s’est pas non plus doté de place financière boursière commune même en zone euro où les pays partagent la même monnaie. Elle n’a pas encore de véritable politique étrangère et défense communes, ni de siège commun dans les instances internationales comme l’ONU, la banque mondiale et le FMI. Elle n’a qu’un budget commun médiocre de 1% de son PIB, dont 40% consacrés à la PAC (Politique Agricole Commune), ce qui limite ses projets communs, ses investissements conjoints. Même pour faire face à la crise financière, elle n’a pas conçu de plan de relance à l’échelle européenne, ni émis d’emprunt européen.

Quelques initiatives récentes ont vu jour, pour aller vers une coordination budgétaire, vers une harmonisation fiscale de l’impôt sur les sociétés, ou encore créant un fonds d’intervention pour prêter aux pays fortement endettés (Grèce, Irlande). Un haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a été nommé, Katrin Ashton, mais cette dernière est malheureusement très absente, très passive …

L’Europe paraît souffrir de trois maux dans son modèle :

1-        l’absence de réel projet commun, d’un objectif motivant tous les pays pour le bien commun, qui leur donne une direction et l’envie d’avancer. Toutes les initiatives européennes sont plutôt vécues comme des contraintes, en motivation négatives. A la différence du rêve américain, il n’y a pas de rêve européen, en tout cas de l’intérieur.

2-        une incohérence entre d’une part la conscience collective visant des objectifs communs pour servir l’intérêt général, notamment pour faire face au réchauffement climatique, à la pénurie des ressources, d’autre part les intérêts particuliers des Etats et des individus. Le chacun pour soi reprend le dessus, le donnant-donnant aussi (j’accepte de contribuer financièrement au budget européen si je reçois autant de l’Europe), je fais valoir mes intérêts même s’ils sont au détriment du voisin. L’absence d’harmonisation fiscale et sociale conduit à une concurrence commerciale déloyale et à des délocalisations intra-européennes dans un contexte de tension et d’incompréhension des citoyens.

3-        Une identité européenne mal définie, mal perçue par les citoyens : il ne suffit pas d’un drapeau, d’une devise et d’un hymne national, ou encore d’un passeport, pour forger une identité dans laquelle les citoyens se reconnaissent. Il faut plus. Il faut que les citoyens européens se sentent membres d’une même communauté de destin, adhèrent à des valeurs communes clairement exprimées, à des objectifs formant un projet commun, se sentent impliqués, responsables et partie prenante. Ce qui passe par un fonctionnement plus participatif, une information quotidienne, courante, sur les décisions à prendre pour l’Europe. Il faut faire « aimer » l’Europe. Or non seulement l’Europe paraît loin des citoyens, les décisions semblent être prises à leur insu, mais en plus les symboles identitaires du drapeau, de la devise, de l’hymne, ne sont même plus mentionnés dans le traité de Lisbonne …

En ces temps difficiles et graves de crise économique profonde, de crise des dettes européennes qui mettent l’euro en danger, des Etats sont tentés par le repli  et le protectionnisme, les citoyens sont inquiets et ont un besoin légitime de protection. Ils peuvent être sensibles à des discours populistes qui prônent une sortie de l’euro ou de l’Europe, dont les conséquences seraient catastrophiques, générant misère et inflation.

Il y a bien un modèle européen, avec des forces et des faiblesses. Les faiblesses de l’Europe, nous les connaissons et donc avec espoir et détermination, avec le soutien des citoyens, devons savoir les affronter. Il s’agit donc bien de poursuivre, de compléter l’achèvement de ce modèle européen et d’inscrire cet objectif dans un projet européen. Un modèle que nous souhaitons aussi exemplaire pour le monde.

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Nicolas Sarkozy ne défend pas les agriculteurs !

Cette parade de Nicolas Sarkozy ce matin au Salon de l’Agriculture est une parodie. Alors qu’il tente de montrer compassion envers les agriculteurs en détresse, d’envisager des aides palliatives, rappelons-nous que le gouvernement a été complice des causes de cette détresse, a approuvé la suppression des quotas, la libéralisation excessive qui conduit à casser les prix, en dessous des prix de revient. Et au delà de ces paroles quels actes ? 
Le texte présentant la position du gouvernement français sur la stratégie de l’Union européenne à horizon 2020,  pour préparer le Conseil européen des 19-20 mars prochains, ne parle pas du tout de l’agriculture !

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Le président de la République a annoncé ce matin ses mesures pour aider le secteur à sortir de la crise. «Je ferai pour l’agriculture française et européenne ce que nous avons déjà fait pour sauver la finance, a martelé Nicolas Sarkozy. Voir l’article du Figaro.

 

Ces mesures annoncées pour soutenir les agriculteurs sont : 800 millions d’euros supplémentaires de prêts bonifiés, et 50 millions en plus d’allègements de frais financiers pour les emprunts anciens. Sans oublier l’exonération des charges patronales pour les saisonniers et un probable allègement des contraintes écologiques qui pèsent sur l’agriculture (fi du Grenelle de l’environnement !).

 

C’est le pansement sur la jambe de bois ! Songez que les agriculteurs français ont perdu 20% de leur revenus en 2008 et 30% en 2009. 1/3 des exploitations menacées de disparition à très court terme. Les agriculteurs ne peuvent même plus vivre de leur travail.

 

Les causes profondes viennent de ce modèle de société dérégulé dans la mondialisation, de la dictature des prix du marché et de la loi du plus fort,, où les prix font la voltige au gré des déséquilibre de l’offre et de la demande marginale, imposant un prix à tous, d’un marché dominé par des centrales d’achat puissantes face à des milliers de producteurs sans pouvoir. Ce monde nous conduit vers l’éradication de l’agriculture familiale, des petites exploitations, favorisant les grandes industries agricoles inhumaines. la concentration des moyens de production pour une agriculture intensive et loin des lieux de consommation, donc coûteuse en carbone. « L’Europe doit rééquilibrer le marché en permettant l’organisation des producteurs », comme l’a préconisé François Bayrou.

 

Or, c’est bien notre gouvernement actuel qui a favorisé cette politique de dérégulation, qui a approuvé la suppression des quotas européens de production, notamment les quotas laitiers, qui permettait de réguler les prix. Enfin, dans le débat sur l’avenir de la PAC, qui doit être revue avant 2013, Nicolas Sarkozy s’est dit prêt à diminuer le budget de plus de 50 milliards d’euros mais à condition que les agriculteurs vivent avec des prix décents et que l’on applique la préférence communautaire. Il s’est aussi engagé à défendre l’agriculture française à Bruxelles.

 

Alors, que propose le gouvernement à l’Europe en matière de politique agricole  ?

RIEN.

 

Je vous invite à lire le document remis le 13 janvier 2010 par le gouvernement français à la Commission européenne, rédigé sous la responsabilité de Pierre Lelouche, donnant la position de la France sur la stratégie de l’Union Européenne à horizon 2020. Voir aussi l’article de Euractiv.fr.

 

Vous serez étonnés de lire que le sujet de l’agriculture et de la PAC n’y est absolument pas abordé, de même que d’autres sujets tout aussi importants tels que la lutte contre les paradis fiscaux et la corruption, une taxe carbone européenne ou  une taxe carbone aux frontières, le renforcement de l’Europe dans les instances internationales pour parler d’une voix, la mise en place d’une veritable force d’intervention européenne en cas de conflit ou de catastrophe (cf Haïti), l’action européenne envers les PVD et le problème de la crise alimentaire, la lutte contre la faim dans le monde, même si on évoque au moins une volonté de lutter contre la pauvreté.

 

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Leçon de l’abstention : comment rendre l’Europe plus proche du citoyen ?

Pour les prochaines élections européennes qui se dérouleront le 7 juin prochain est annoncé un taux d’abstention record, qui pourrait atteindre entre 60 et 65%, pire qu’en 2004 qui présentait déjà un record avec le taux de 57,5% d’abstention pour la France. L’Europe de l’Est n’est pas en reste avec un pronostic encore pire que celui de la France. Depuis 30 ans, les électeurs ont marqué un désintérêt croissant à l’égard du Parlement européen. Pourquoi et comment les intéresser à nouveau à l’Europe ?

 

1- Comme le dit Philip White, analyste au Centre pour les réformes européennes à Londres : « Beaucoup d’électeurs ne comprennent pas ce que fait le Parlement européen. Si ses pouvoirs ont été renforcés, ils portent surtout sur des problèmes relativement techniques – santé, télécoms – et non sur les impôts, le budget ou l’éducation qui importent beaucoup plus aux gens« . De plus, souligne-t-il, « aucun gouvernement n’est en jeu« . Et après l’avoir un temps envisagé, aucun parti n’a fait du choix du prochain président de la Commission européenne un véritable enjeu électoral.

2- Les gens ont l’impression que leur vote ne servira à rien. Au fond, que la majorité soit emportée par les conservateurs de droite ralliés au PPE ou par les socialistes et sociaux-démocrates du PSE, ils ont tous soutenus l’Europe libérale, la candidature de Barroso, et envisagent de le reconduire, ce qui est très étonnant vu son soutien constant à l’Europe libérale, le dogme de la concurrence sur les prix avant tout et sans tenir compte de la concurrence déloyale sociale et fiscale, souvent contre l’intérêt général et les services publics, son inaction pendant la crise, sa défense des intérêts de certains Etats plutôt que de l’intérêt général, son soutien à la guerre d’Irak en organisant la réunion aux Açores le 16 mars 2003 lorsqu’il était premier ministre du Portugal, à laquelle ont participé George W. Bush, Tony Blair et Maria Aznar. Rien n’a arrêté les délocalisations, au sein de l’UE et à l’extérieur, avec les pertes d’emplois qui s’ensuivent, la progression des inégalités, la spéculation financière sur le pétrole, les matières premières et même les denrées alimentaires et la guerre des prix dans un environnement mondialisé de libre échange et de concurrence acharnée, de plus en plus dérégulé, aggravant les souffrances des pays pauvres et des populations défavorisées, instaurant le règne du profit au bénéfice des puissances financières alors que les revenus et le pouvoir d’achat des classes moyennes a stagné. C’est bien cela que les gens ressentent et leur désespérance, au lieu de se traduire par une mobilisation, se manifeste par un boycott du vote. C’est aussi une façon de dire aux politiques « nous ne croyons plus en vous ».

C’est fort dommage, car cette réaction renforce l’abandon des décisions aux élites, souvent aux partis dominants, qui seront de toutes façons élues au Parlement. Elle délégitimise encore plus la représentation des citoyens au Parlement européen, alors même que cette institution bénéficie d’un scrutin particulièrement démocratique, entièrement à la proportionnelle, et d’un fonctionnement également très démocratique, avec délibérations, discussion entre les parlementaires des différents partis qui arrivent à s’entendre sur un consensus, mieux qu’au sein de notre Assemblée Nationale qui fait plus figure d’une chambre d’enregistrement des décisions gouvernementales.

Il faut rappeler aux citoyens français que plus de 60% des lois votées en France proviennent de l’Union européenne, sont des transpositions de directives européennes. Il faut également convenir que dans la mondialisation, les grands problèmes des défis climatique, énergétique, de l’accès à l’eau, de l’immigration et du développement des pays pauvres, du commerce international, des paradis fiscaux et de la régulation financière, des actions face à la crise financière et économique et bien d’autres encore, ne peuvent être résolus qu’à un niveau mondial, donc européen pour que l’Europe elle-même pèse dans le monde à l’OMC, au FMI, à la Banque Mondiale, etc.

Mais les gouvernements et les partis, ainsi que les médias et la presse, sont en grande partie responsables de ce désintérêt croissant des citoyens pour l’Europe. En effet, quelle information est relayée auprès des citoyens, entre les échéances électorales, sur l’activité du Parlement et de la Commission européenne, sur les décisions qui doivent s’y discuter ? Quel lien le citoyen entretient-il avec les députés européens élus de sa région pour pouvoir émettre un avis ? Quelle information est donnée et avec quelle transparence sur les lobbies qui participent à l’information et à l’influence qu’ils exercent sur la Commission et sur les parlementaires ?

Le citoyen averti, qui s’intéresse particulièrement au sujet, peut chercher l’information sur Internet, sur les sites de l’Union européenne, du Parlement européen et de la Commission européenne, sur le site de presse spécialisé Euractiv, sur le site de la Fondation Robert Schuman qui publie des études très intéressantes (pour ces deux derniers sites je recommande l’abonnement à la lettre d’info hebdomadaire par mail). Mais il faut du temps,… Certains partis diffusent à leurs adhérents au niveau régional ou national une lettre trimestrielle ou semestrielle de leurs parlementaires européens pour les informer des grands thèmes discutés et de la position de leur parti, des amendements défendus, mais cela reste assez rare.

Alors voici quelques idées pour rapprocher l’Europe des citoyens :

1- Commencer dès l’école, le collège et le lycée, à sensibiliser les jeunes à l’importance de l’Europe. Leur donner une conscience d’Europe et de citoyenneté européenne, en leur faisant d’abord comprendre les peuples européens au travers de leur histoire et de leur culture (comment comprendre l’atlantisme de certains pays européens de l’Est comme la Pologne, sans avoir compris leurs anciennes souffrances du temps de leur soumission à l’URSS ?), en rappelant l’idée initiale des pères fondateurs, Robert Schuman et Jean Monnet, de l’union des peuples d’Europe au lendemain de la guerre pour garantir la paix des peuples, mettant en commun le charbon et l’acier, matière première de la guerre, en expliquant les avancées réalisées depuis pour en arriver aujourd’hui à une intégration économique et monétaire, à la défense de droits de l’homme et au renoncement à la peine de mort, à la préservation de libertés individuelles, à une Cour de justice européenne …

En fournissant une explication des institutions européennes non limitée à retenir par coeur les définitions juridiques de ces institutions et le lieu où elles siègent et à quoi elles servent, mais pourquoi en quoi elles doivent fonctionner dans le sens de l’intérêt général des peuples et de la solidarité, en représentant ces peuples dans les décisions.

2- Obliger la presse nationale à une publication régulière, une fois par mois ou par trimestre, à publier une ou deux pages informant les citoyens sur les thèmes qui seront discutés dans les trois prochains mois, leurs enjeux, et leur permettre non seulement de s’informer mais aussi de réagir directement ou par l’intermédiaires de syndicats et d’associations pour interpeller leurs élus parlementaires européens, par courrier ou par internet. Informer en toute transparence les citoyens sur les lobbies, qui devraient être soumis à un enregistrement, un encadrement et à une régulation comme le suggère l’association Anticor aux partis concourant aux élections européennes (je recommande le soutien à cette association qui combat la corruption et oeuvre pour l’éthique politique).

Faire connaître la nouvelle chaîne parlementaire européenne EuroparlTV (voir article de Euractiv), avertir de ses programmes et y permettre la rediffusion des délibérations, notamment entre les ministres représentant le Conseil européen.

3- Généraliser un lien de communication public entre le député européen et les citoyens, par son site parlementaire nomduparlementaire.eu, les informant de ses positions, de ses actions, et permettant en retour de recueillir des avis, suggestions.

4- Proposer de proportionner le nombre d’élus députés au Parlement européen en fonction du taux de participation du pays au vote. Ainsi, si le taux est deux fois moindre que la moyenne européenne, le nombre de députés serait deux fois moindre. Cela motiverait peut-être les peuples, ainsi que les Etats dans leur communication sur l’Europe et l’importance de ces élections. 

5- Permettre aux citoyens européens d’adhérer directement à un parti européen. Aujourd’hui, le PPE (Parti Populaire Européen), le PSE (Parti Socialiste Européen), le PDE (Parti Démocrate Européen), les Verts européens, etc., sont des partis auxquels adhèrent des parlementaires eux-mêmes issus de partis nationaux et non directement des citoyens. Une adhésion directe permettrait une légitimation citoyenne et un lien direct entre les peuples et des courants politiques de niveau européen. 

6- Enfin garder les symboles (Hymne, devise, drapeau) qui renforce l’idée d’appartenance et de citoyenneté européenne, car les symboles sont important dans l’esprit collectif des peuples. Pourquoi ont-ils été supprimés du traité de Lisbonne, alors que les peuples ne le demandaient pas et y sont plutôt attachés ? Est-ce pour marquer par principe une différence de contenu avec le traité constitutionnel initial, afin de légitimer un nouveau traité et un nouveau vote, alors que le contenu principal est toujours aussi complexe et incompréhensible par les peuples ?

Ces propositions résultent de plusieurs débats et discussions citoyennes auxquels j’ai récemment participé au mois de mai sur ce thème lors de cafés démocrates consacrés à l’Europe.

Pour votre avis à tous.

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L’identité européenne à l’épreuve de la diversité

À la veille des élections européennes, l’association « Les Marianne de la diversité »  a organisé une soirée débat sur ce thème le mercredi 15 avril 2009 à la Maison de l’Europe, en coopération avec la Fondation Genshagen. Les Marianne souhaitent sensibiliser les citoyens à la diversité et à l’égalité des chances, enjeu majeur pour notre identité nationale et européenne. <--break->  

Invités à débattre à la tribune : Pervenche BERES (Députée européenne, PS), Bernard LEHIDEUX (Député européen, Modem), Djamila SONZOGNI (Porte-parole nationale, Les Verts). L’UMP et le NPA n’ont malheureusement pas répondu à l’invitation.

 

Pour les interviewer, des personnalités issues de la société civile : Sihem HABCHI, Ni putes ni soumises, Amirouche LAIDI, Club Averroès et Dominique SOPO, SOS Racisme.

 

Le débat a été introduit par Catherine Lalumière, présidente de la maison de l’Europe, ancienne ministre, puis animé par Charlotte WIHANE, administratrice des  Marianne de la diversité et Marc CHEB SUN, directeur de Respect Magazine. Fadila Mehal, présidente des Marianne de la diversité, a conclu la séance avec Klara Wyrzykowksa, de la fondation Genshagen.

 

 

  

Il serait difficile de rendre compte de toutes les questions et réponses de ce débat, tant elles furent nombreuses et riches en réactions, dans un temps trop limité pour pouvoir répondre aussi aux questions de l’assistance, mais que les invités à la tribune ont promis de traiter hors séance, par mail.

 

Essayons d’en retenir les points les plus marquants.

 Le tour des questions … 

Défense du droit des victimes 

La représentante des Verts, Djamila SONZOGNI, très précise et concrète dans ses propositions, déplore que l’utilisation à foison des termes « égalité des chances » et « diversité » ne réponde pas aux problèmes de discriminations. Ce n’est pas simplement par des actions symboliques, telles que la réservation de places de quotas de jeunes issus de l’immigration dans les Grandes Ecoles que cela change grand-chose à la discrimination dans la société. Ses propositions :

         L’Etat et les services publics doivent en premier lieu montrer l’exemple. Ils concernent aujourd’hui pratiquement 50% des discriminations,

         Il faut commencer par supprimer les discriminations illégales : les emplois réservés à la nationalité française, comme par exemple les pompes funèbres, agent de nettoyage dans les collectivités locales,…

Les Verts défendent la citoyenneté de résidence, un droit de vote pour les étrangers résidant dans les pays de l’Union, la mise en place d’une carte de résident européen, la libre circulation des étrangers dans tout le territoire européen.

Pour Pervenche Beres, représentant le PS, la charte de la citoyenneté européenne doit s’appliquer à toute personne résidant dans le territoire européen. Elle espère que les actions de groupe, sur lesquelles un débat est aujourd’hui ouvert au Parlement européen avec la Commission sous l’aspect du droit des consommateurs dans le cadre du marché intérieur, seront étendues ensuite à la défense des victimes de discrimination.

Bernard Lehideux, représentant le MoDem, rappelle que la lutte contre les discriminations est un des thèmes sur lesquels l’Union a bien avancé, depuis son origine. Il reste néanmoins encore beaucoup de progrès à faire. Il est anormal aujourd’hui que la demande d’asile doive être examinée dans le pays d’accueil de l’immigré. Cette demande pourrait être élargie aux autres pays de l’Union.

 La « directive retour » et la politique du chiffre  

Pour Pervenche Beres du PS, il faut bien être conscient que sur de nombreux sujets touchant aux valeurs, les pays de l’Union partent de niveaux très différents et la définition d’une norme commune risque d’apparaître comme une régression. Par exemple sur des sujets où la France est plus en avance sur les autres. Pour beaucoup de pays (l’Italie, Chypre, la Hongrie), la directive retour apporte enfin une norme face au vide législatif national.
Ce qui la choque, c’est l’acceptation d’un marché intérieur où tout circule sauf les pauvres !

 La faible représentation de la diversité dans les médias  

Face aux questions adressées sur un ton de reproche aux Parlementaires européens sur le fait que des sujets ne paraissent pas être traités, comme la représentation de la diversité dans les médias, Bernard Lehideux rappelle que c’est la Commission européenne qui est à l’initiative des textes et que sur certains sujets, les dirigeants des Etats membres souhaitent garder leur capacité de décision au niveau national. Sur la presse et les médias, ils ont orienté les débats de niveau européen sur la concentration économique et l’indépendance de la presse, mais pas sur ce thème. Plus généralement, Bernard Lehideux pense que ce n’est pas l’établissement de quotas, qu’ils soient déterminés par les Etats ou par l’Union, qui règle le fond du problème de représentation de la diversité, quotas qui supposent des normes de fichage et des statistiques dont la mise en place peut être sujette à caution. C’est plutôt la pression de l’opinion sur les supports, qui impose un comportement visant à représenter les citoyens conformément à leurs attentes, qui doit infléchir naturellement cette représentativité.

 

Tout en ne s’affirmant pas favorable aux quotas visant à une « discrimination positive », dans les médias ou ailleurs, la représentante des Verts se déclare pour des statistiques ethniques afin de pouvoir rendre compte des discriminations d’une manière transparente.

 Les violences faites aux femmes 

Bernard Lehideux affirme que c’est bien au niveau européen que peut avancer un tel sujet. Le Parlement a déjà proposé des résolutions en la matière en janvier 2006, mais qui ne sont pas encore arrivées au texte législatif. Il déplore que la présidence française de l’Union n’ait établi que des lignes directrices sans être allée plus loin en termes législatifs.

 

Sur ces thèmes de la traite des femmes et des violences faites aux femmes, le PS soutient aussi des dispositions législatives.

 

Djamila SONZOGNI souligne les niveaux très inégaux en Europe en termes d’égalité homme-femme et de parité et parfois des régressions visibles, comme par exemple la Grande Bretagne qui revient à la séparation entre les filles et les garçons dans les écoles. Il faudrait instituer la clause de la Nation européenne la plus favorisée, nivelant les autres sur la meilleure.

 

Pervenche Beres fait remarquer que les débats sur la prostitution et la procréation divisent profondément non seulement les groupes politiques européens mais aussi les pays, qui ont des pratiques bien différentes, sur lesquelles le consensus est difficile. La religion vient souvent polluer le débat. La laïcité n’est pas une valeur reconnue au niveau européen. Pour s’en servir de vecteur d’émancipation pour la femme, il faudrait pouvoir déjà arriver à un consensus sur la laïcité. Pour Bernard Lehideux, la laïcité est en effet un point essentiel à défendre au niveau européen.

 La politique étrangère de l’Union pour porter la défense de ces valeurs dans le monde 

Bernard Lehideux rappelle tout en le déplorant qu’il n’y a aujourd’hui ni politique étrangère européenne ni politique de défense européenne. Il cite aussi l’exemple des relations de l’Union européenne avec les ACP (pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique signataires des accords de coopération,  principalement des préférences tarifaires donnant accès à ces pays au marché) : à chaque fois que l’Europe a voulu sanctionner le dictateur du Congo, Robert Mugabe, les pays ACP ont refusé par solidarité. On ne peut aller contre le principe de souveraineté nationale, sauf à agir comme les Etats-Unis l’ont fait en Irak, par la guerre …

 

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 COMMENTAIRES EN SYNTHESE SUR L’IDENTITE EUROPENNE 

Tout d’abord le thème lui-même peut paraître « accessoire » au quidam européen, face aux graves problèmes soulevés par la crise financière, économique, sociale qui secoue aujourd’hui l’Europe dans la mondialisation, ainsi que face aux grands défis écologique, énergétique et climatique qui menacent le monde. Et pourtant, le sujet n’est pas anecdotique et peut même être considéré essentiel pour construire cette Europe à ce point charnière auquel nous sommes arrivés. Car pour construire ensemble un tel projet, il faut s’accorder sur des valeurs communes et viser des objectifs communs, en acceptant un effort de solidarité, certaines concessions au bénéfice du groupe qui en retour, optimisent finalement le sort de chacun.

 Des valeurs nous unissent dans notre diversité  

Comme l’a rappelé Mme Lalumière, la construction européenne est née contre la barbarie, en réaction aux totalitarismes qui ont sévi après la crise financières des années trente (qui n’est pas sans rappeler le contexte actuel) : le nazisme, le stalinisme, les dictatures de Mussolini et de Franco.

La devise de l’Europe est « Unie dans la diversité ». Cette devise signifie que, au travers de l’Union européenne, les Européens unissent leurs efforts en faveur de la paix et de la prospérité, et que les nombreuses cultures, traditions et langues différentes que compte l’Europe constituent un atout pour le continent.

Le Conseil de l’Europe a toujours été sensible à ce qui portait atteinte à l’égalité entre les hommes. L’Europe est démocratique, tolérante et ne doit pas accepter la discrimination. Ces valeurs communes nous unissent et contribuent, par leur adhésion, à notre identité européenne, sans pour autant que cette identité supplante, ignore ou renie nos identités nationales et régionales. Elles sont simplement d’un autre niveau.

 Mais subsistent des sujets de discordes sur certaines valeurs … Citons quelques points sur lesquels les pays ne sont pas tous au même niveau de culture ou de compréhension :

         la laïcité, valeur républicaine forte pour la France, mais pas pour d’autres pays comme la Grande Bretagne, qui s’accommode des communautarismes, ni la Pologne qui prône la valeur « chrétienne » comme une valeur d’Etat,

         la citoyenneté : droit du sang ou droit du sol ?

         les différentes formes d’atteinte à la vie, telles que le droit à l’avortement, l’euthanasie, la recherche sur les cellules souches, la procréation assistée, les mères porteuses, …

         la légalisation des drogues douces,

         la légalisation de la prostitution,

        

Comment s’accorder sur ces points de divergence ? L’existence de ces divergences ne doivent pas empêcher la construction d’une identité européenne sur les points de convergence ainsi que la poursuite d’un débat et la recherche d’un consensus sur les points de divergence.

 Manque d’identité européenne et risque de replis identitaires communautaristes ? 

A l’heure où les identités culturelles, idéologiques et religieuses souffrent d’un délitement, où les citoyens ne font plus confiance aux politiques, délaissent de plus en plus les syndicats, boudent les élections, perdent leurs repères idéologiques et les traditions, où même la famille est désagrégée, recomposée, déstabilisée, ils peuvent être tentés par des réflexes identitaires très forts, par d’autres types de reconnaissance identitaire, telle que l’origine ethnique, la secte, une langue spécifique (langage des cités), des tatouages et des piercings, le retour à la religion sous une forme plus intégriste avec signes extérieurs de reconnaissance (foulard), … Gilles Lipovetsky l’a bien décrit dans son dernier essai sur « la culture monde ».

 

L’enjeu de l’Europe, dans ce contexte, est de proposer aux citoyens européens des valeurs dans lesquelles ils se reconnaissent et un projet de société pour lequel ils aient envie de mobiliser leur énergie, et développent vis-à-vis de leurs semblables un sentiment d’identité commune et de fraternité au travers de ce projet, de ce combat commun. C’est le sens de ce que prône Régis Debray dans son dernier livre « Le moment fraternité ».

 

Cette identité est à construire. Elle passe par les valeurs et le projet de société clairement exprimés et pour auxquels les citoyens adhèrent démocratiquement, non un modèle qui leur soit imposé par des technocrates dont le seul credo est le dogme de la concurrence et de l’efficacité du marché où ne règne que la loi du profit et du plus fort.

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L’hymne européen en latin

Una in diversitate

Una in diversitate

Cela peut paraître désuet et pourtant n’est-ce pas une bonne idée, de proposer d’entonner en latin l’hymne européen ?

Afin que tous les citoyens des pays de l’Union puissent le chanter ensemble, et plutôt que dans la langue d’un des pays européens (l’anglais s’imposerait à nouveau). Non seulement pour ne pas faire de jaloux, mais parce qu’au fond, même s’il est qualifié de langue « morte », le latin constitue une racine commune de nos langues vivantes. Comme le disait Christian Huber dans un article en mai 2004 : « Les historiens rappellent que le latin servit de langue de communication pendant des siècles dans toute l’Europe, notamment à l’université (d’où le nom du Quartier latin à Paris), et fut même une langue officielle en Hongrie jusqu’au 19e siècle. »

Voici les paroles en latin qu’avait composées Peter Roland pour l’hymne européen (hymnus Europeae), à chanter sur la 9ème de Beethoven :

Est Europa nunc unita
Et unita maneat
Una in diversitate
Pacem mundi augeat
Semper regant in Europa
Fides et iustitia
Et libertas populorum
In maiore patria
Cives, floreat Europa,
Opus magnum v ocat vos
Stellae signa sunt in caelo
Aureae, quae iungant nos.

Traduction en français :

L’Europe est unie désormais
Qu’elle garde son unité
Unité dans la diversité
Qu’elle contribue à la paix mondiale
Que foi (fides) et justice règnent en Europe
Ainsi que la liberté de ses peuples
Dans une patrie élargie
Citoyens, que prospère l’Europe
Une grand oeuvre vous attend
Des étoiles dorées dans le firmament
Sont les symboles qui nous unissent.

Le mouvement Démocrate pourrait reprendre cette proposition à l’occasion des prochaines élections européennes ! Voyons ce qu’en pense François Bayrou …

Référence : article de Christian Huber, du 3 mai 2004 :
http://forum.lixium.fr/v-4698219.htm

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Le système financier européen : quelques réflexions

europe-bouquet-de-drapeaux1Voici quelques réflexions sur la mise en place d’un système financier européen. Il ne s’agit pas de répéter ce discours tant entendu et maintenant objet d’un consensus, sur le renforcement de la régulation et son extension à tous les acteurs financiers, sur la lutte contre les paradis fiscaux, sur le changement de normes comptables pour éviter une finance procyclique amplifiant les variations, etc …

L’objectif est plutôt de proposer une approche plus globale et de pointer certains aspects stratégiques dont personnes ne semble se soucier et qui sont pourtant fondamentaux. Listons certains constats, identifions les risques, puis tirons-en ensuite certaines leçons :

Les constats :

rappel des enjeux relatifs mondiaux en termes de PIB :

Le PIB mondial 2007 s’élevait à 54 000 Mds de $. La capitalisation boursière mondiale est du même ordre de grandeur, elle s’élevait en janvier 2008 à environ 50 000 Mds de $ et en octobre 008 était tombée à 25 000 Mds de $ et s’est encore dégradée depuis. La perte de valeur totale 2008 des bourses suite à la crise financière est donc égale à environ 50% de la valeur de production annuelle du monde ! Elle ne correspond pourtant pas à une baisse de moitié de la production mondiale, ni à une destruction des biens ou des entreprises réelles pour la moitié d’entre eux. Cette baisse est le résultat de l’effet amplificateur d’une surévaluation d’origine spéculative de certains actifs suivie d’un effet amplificateur d’une dévaluation de ces actifs, entraînant par contamination une crise de confiance ayant étendu la dépréciation à un ensemble d’entreprises, de biens immobiliers, et entraînant le risque de faillites en chaîne.

– Avec 17 000 Mds de $, l’Union européenne représente 31,5% du PIB mondial, devançant les Etats-Unis (14 000 Mds $, 26%), le Japon ( 4 400, 8%), la Chine (3 300, 6%), la Russie à égalité avec le Canada (1 300, 2,4%), l’Inde (1 200, 2,2%).
Au sein de l’UE, l’Allemagne réalise un PIB de 3 300 Mds $, soit 19,4% de l’UE, égal à la Chine (6% du PIB mondial), suivi par le Royaume Uni avec 2700 (15,9% de l’UE, 5% du monde), la France arrivant pratiquement à égalité avec 2 600 Mds$ (15,3% de l’UE, 4,8% du monde), l’Italie 2 100 et l’Espagne 1400.

En étant solidaire et cohérente, en parlant d’une voix, l’Europe a un poids prépondérant dans le monde.

les acteurs qui ont causé la crise sont quelques acteurs financiers et quelques personnes, situés aux Etats-Unis, encouragées par un système laxiste et insuffisamment régulé, personnes qui étaient soit mal intentionnées soit irresponsables.

les acteurs finaux les plus touchés par cette crise financière devenue économique, sont très nombreux, non seulement américains mais aussi européens, asiatiques, sud-américains, moyen-orientaux et Africains. Ce sont outre les entreprises qui sont ici considérés comme acteurs intermédiaires, d’abord des êtres humains, des familles, des personnes qui vont perdre leur logement, leur emploi, les chômeurs qui ont avoir du mal à retrouver du travail, les épargnants dont la valeur d’épargne a fondu, non seulement les fortunés mais aussi les retraités dont les revenus sont tirés de fonds de retraite par capitalisation. Dans un tel cas on voit la faiblesse du système américain comparé à une système de retraite par répartition qui lui est plus sensible à l’évolution démographique mais moins aux aléas de la bourse (même le fonds de retraite des fonctionnaires américains a perdu en 2008 3 Mds de $ sur un total de 65 Mds de $).

Régulation et surveillance financière opérées différemment selon les Etats alors qu’il y a porosité complète entre les économies et les entreprises de ces Etats. On constate donc que même si la finance et les banques européennes et notamment françaises étaient mieux équilibrées, mieux dotées de fonds propres, mieux régulées et surveillées que la finance et les banques américaines, elles n’ont pas été à l’abris des dégâts collatéraux, du fait de l’interdépendance économique et financière dans la mondialisation et notamment dans un contexte de libre-échange, de déréglementation à tout va.
Seule une régulation cohérente au niveau mondial sera efficace. Son préalable est une régulation européenne cohérente et le poids de l’Europe pour peser dans les décisions visant à mettre en place cette régulation internationale.

Le facteur culturel.
Pourquoi l’environnement bancaire et financier américain est-il tant sujet à des déficiences de contrôle, que les Européens semblent découvrir maintenant avec effroi et stupeur ? Par exemple les enquêtes et contrôles de la SEC aux Etats-Unis, qui équivaut à l’AMF, sont « sur pièce » (et sur déclaration sur l’honneur) et pratiquement jamais « sur place », contrairement à chez nous. Idem d’ailleurs au Royaume Uni. Cela vient notamment d’un facteur culturel : dans la culture anglo-saxonne protestante, le mensonge est inadmissible et si un acteur ment ou commet un délit, il se trouvera toujours un délateur pour le dénoncer, ce dernier étant considéré comme un héros et la délation comme un acte civique. Alors que dans les pays latins, le menteur ou celui qui profite du système, fraude le fisc, sait contourner la loi, est un rusé (presque un héros) et le délateur est considéré comme un traître et un collabo. Voyez l’image populaire dont bénéficie Bernard Tapie en France !
Ceci explique en partie que les Etats-Unis et le Royaume Uni n’aient pas mis en place les dispositifs de vérification et les infrastructures de police financière tels qu’on les connaît en France et en Italie. Mais avec la mondialisation, les cloisonnements ont sauté, les entreprises à l’origine étrangères se sont installées aux Etats-Unis avec leur culture et profitent justement d’y trouver moins de police et de surveillance, et la « morale » s’est un peu relâchée …

L’Europe souffre en ses instances de plusieurs contradictions.
La Commission Européenne souhaite une Europe forte face aux Etats-Unis et à la Chine, mais en même tant la Commission européenne chargée de la concurrence intervient pour empêcher les fusions qui permettraient à un acteur européen d’avoir la taille critique permettant de rivaliser en compétitivité avec des acteurs notamment américains. Elle est chargée de la protection des consommateurs et de promouvoir une politique économique libérale mais à ce titre cherche à démanteler les services publics et interdit aux Etats de sauver leurs industries en crise…
Cela se termine en général par une reprise d’entreprises européennes par les américains (Alcatel-Lucent, Péchinay-Alcan, Nyse-Euronext,…).

L’Europe a beaucoup de mal à faire primer l’intérêt général sur l’intérêt particulier des Etats. Notamment on le sait du fait de sa gouvernance et du vote à l’unanimité, qui bloque toute initiative dès qu’un Etat n’y trouve plus son compte. Ainsi est-il très difficile d’envisager l’unification de la fiscalité et notamment de l’impôt sur les sociétés, source de concurrence entre Etats membres sur la localisation des entreprises et des emplois (le non de l’Irlande au référendum est notamment dû à la crainte de devoir renoncer à la fiscalité attrayante qui en fait un avantage compétitif en Europe) et même la suppression de paradis fiscaux dès lors que certains de ces paradis sont européens.
Les Etats raisonnent plus en termes de « combien je paye et combien ça me rapporte » qu’en termes d’enjeux collectifs.
On le voit avec la réticence de l’Allemagne à accepter les quotas de baisse de gaz à effet de serre pour protéger son industrie automobile, la prudence de la France sur la suppression de la PAC …
On le voit aussi lorsqu’il s’agit d’envisager des fusions d’entreprises entre différents pays d’Europe : Berlusconi refusant un rachat de Alitalia par Air France KLM (finalement finalisé !), la France se repliant sur une stratégie de fusion GDF-Suez coincée entre l’impossibilité de fusionner avec EDF (monopole ou part de marché trop importante au goût de la Commission Européenne) et la peur d’envisager une reprise par, ou une fusion avec, une autre entreprise européenne.
Concernant la bourse, une fusion entre Euronext et Deutsche Börse a été envisagée mais n’a pas pu aboutir, à la fois à cause des difficultés rencontrées face à la Commission qui craint les situations de monopole, et par les Allemands qui furent très rigides dans la négociation, voulant imposer de conserver tout le site en Allemagne. Cela s’est terminé par une fusion entre Nyse (aux Etats-Unis) et Euronext (à Paris). Alors qu’initialement le management devait être partagé entre Américains et Français, JF Théodore étant le n°2, le board est en train de se débarrasser du management européen. Personne n’en parle alors que les enjeux sont bel et bien stratégiques. Dans la continuité de la fusion de ces bourses, notons le projet de fusion DTCC/LCH-Clearnet avec aussi des enjeux stratégiques sous-jacents : localisation physique de la plateforme de clearing aux Etats-Unis, sous une société de droit américain qui donc peut être soumise aux critères d’embargo ou de surveillance imposés par la loi américaine sur les valeurs qui y sont traitées ou les acteurs qui y opèrent.

Les risques

La recherche du bouc émissaire. En tant de crise on cherche des coupables. Hitler a désigné les juifs après la crise de 1929. La crise étant venue par certaines banques américaines, la tentation pourra être de désigner globalement les banques et globalement les américains. Ceux qui se sont enrichis en bourse avant la crise seront montrés du doigt, notamment les patrons ayant bénéficié de stock-options et de parachutes dorés, ainsi que les traders ayant touché des bonus mirobolants, alors qu’ensuite la baisse ne s’est pas imputée sur les profits de ces personnes. D’un côté cela permet de remettre sur la table des injustices criantes, de l’autre le risque est grand de voir des catégories de personnes dénoncées comme coupables à tort, les employés de banque notamment, et les américains en général.

L’exploitation de l’inquiétude des peuples. Face à la peur de perdre leur emploi, leur épargne, leur maison, les gens vont avoir besoin de protection pour leur famille et en même temps ont peur que l’effort de solidarité se fasse au détriment d’eux-mêmes. Ils accueilleront avec bienveillance « plus d’Etat protecteur » et un dirigeant qui s’impose en prétendant les défendre, sans pour autant accepter des hausses d’impôt. L’accroissement de la dette au détriment des générations futures étant un impact indirect auquel ils sont moins sensibles. Les élections européennes vont beaucoup jouer sur ces thèmes. L’UMP a choisi le thème de « l’Europe qui protège ».

La tentation du repli sur soi des Etats européens. En même temps que la crise a remis l’Europe au devant de la scène, notamment avec Nicolas Sarkozy en qualité de Président de l’Union européenne en cette période de crise, multipliant sommets et initiatives communes, les plans de relance sont menés séparément par chaque Etat européen, même s’ils sont fait « en concertation ». Chaque Etat décide de son soutien en capital ou en apport de garantie aux banques et aux entreprises de son pays (avec accord de la Commission européenne), chaque Etat émet sa dette publique ou chaque dispositif privé garanti par l’Etat a recours au marché indépendamment. Il n’y a donc pas de solidarité entre Etats et de surcroît les Etats vont se faire concurrence sur le marché en émettant chacun des titres d’Etat (bons de Trésor, obligations), ce qui risque de tirer les taux long terme vers le haut face à des acquéreurs qui auront l’embarras du choix et seront ravis de trouver des placements « sûrs » à taux intéressant, renchérissant ainsi le recours au financement d’acteurs privés et délaissant les traditionnelles valeurs boursières, donc accélérant la baisse de ces valeurs.
Alors que les entreprises européennes peuvent être implantées dans différents pays d’Europe, avoir des fournisseurs et des clients de différents pays d’Europe, ne faudrait-il pas plutôt privilégier une vision d’ensemble et un financement commun ?

Vers un véritable système financier européen

Le renforcement de l’Europe doit passer par la création d’un véritable système financier européen, de bourses européennes performantes et intégrées (et de marchés organisés européens en général, s’appuyant sur des chambres de compensation européennes), en assouplissant cette règle contreproductive et affaiblissante pour l’Europe du dogme de la concurrence absolue qui empêche les fortes parts de marché et donc vont à l’encontre de puissants organismes capables de concurrencer les américains.

Ce système financier européen doit être accompagné de la mise en place d’un régulateur européen et d’un fonds stratégique d’investissement européen, qui peut partir de la BEI par exemple, en allant plus loin (prise de participation au capital de banques et d’entreprises européennes. Cela contribuera à la cohésion européenne, notamment sur des entreprises implantées dans plusieurs pays d’Europe. Un emprunt européen visant à doter un fonds commun, sur lequel les pays tireraient selon leur besoin, permettrait déjà d’éliminer la concurrence entre pays européens qui vont tous émettre de la dette publique et chercher l’investisseur, contribuant à tirer les taux de dette à la hausse …

Certains pays comme l’Allemagne craignent qu’en faisant un fonds commun ils ne subventionnent les autres pays à leur détriment. Ce serait le cas si les pays dotaient le fonds de fonds propres mais non si c’est un emprunt commun dont on répercute le coût aux bénéficiaires. On peut privilégier les entreprises européennes implantées sur plusieurs pays européens et les projets transversaux, trouver de plus une règle de péréquation plutôt en fonction de la localisation des bénéficiaires des fonds, qui apportent au pays en terme de revenus fiscaux et d’emplois, que d’origine nationale de ces entreprises.

Le fait de mettre en commun des ressources au service d’intérêts communs, d’entreprises communes, éviterait la concurrence et les conflits, comme la CECA a permis à la France et à l’Allemagne de le faire à la sortie de la guerre.
Ne pourrait-on l’organiser pour des ressources stratégiques, l’énergie notamment le nucléaire, la gestion de l’eau, et même certaines productions agro-alimentaires ?
A l’instar des transports publics et les réseaux ferrés, les banques et les assurances, les bourses et plates-formes de compensation de titres et de paiement sont des services publics, au sens de « au service au public » et non forcément au sens « d’entreprises publiques nationalisées ». Il est tout a fait envisageable que ces services soient organisés plutôt comme des mutuelles où les utilisateurs sont actionnaires et soient gérés au niveau européen, sans pour autant être entreprises d’Etat, comme par exemple SWIFT (service mondial assurant la normalisation et l’acheminement des ordres de paiement internationaux) qui est une entreprise privée détenue par l’ensemble des acteurs bancaires utilisant le service, de même pour l’ABE réalisant le clearing interbancaire de paiements en euro.
Au lieu de viser un objectif d’enrichissement financier d’actionnaires privés qui visent le profit à court terme plutôt que le développement à long terme de l’entreprise et l’optimisation de son utilité sociale, favoriser un tel système de gouvernance de banque et d’entreprise, où les actionnaires sont clients et même en partie salariés de ces entreprises induirait nécessairement des objectifs au service de l’intérêt collectif. Si cette gouvernance est transverse à différents pays d’Europe, au service de clients situés dans différents pays européens, on évitera le repli sur soi national et on favorisera naturellement la solidarité.

On peut aussi envisager une régulation de l’effervescence spéculative par le biais d’une taxe sur les capitaux échangés (Taxe Tobin), idée soutenue dès le début par F.Bayrou et M. de Sarnez (et aussi reprise par les Verts). Cette taxe pourrait abonder un fonds européen de garantie utilisé pour l’utilisation de plates-formes communes (boursières) par exemple.

Enfin n’oublions pas en termes de gouvernance mondiale une Europe qui puisse parler d’une seule voix au sein des ONG, du FMI et de la BRI, de l’ONU, de la Banque mondiale, du G8 et du G20, de l’OMC, … ainsi que face aux instances de régulation américaines, chinoises, etc. Condition nécessaire pour convenir notamment d’une régulation internationale.

Ces propositions ne coulent pas de source et sont difficile à prendre par les Etats et les acteurs nationaux concernés, qui hésitent à déléguer leurs pouvoirs à une instance supérieure. Les régulateurs nationaux trouvent toutes les raisons pour faire obstruction à la mise en place d’un régulateur européen. Il faudra une volonté politique forte pour y arriver. Une restructuration de l’actionnariat et de la gouvernance d’entreprises visant à multiplier les actionnaires européens en privilégiant des actionnaires « clients », intéressés au développement durable de l’entreprise, ne se fera pas non plus sans impulsion politique.

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Les contradictions internes de la Commission Européenne affaiblissent l’Europe

commission-europeenne-2La politique européenne est parfois déconcertante, déroutante, prise au piège de ses contradictions. Au sein de la Commission européenne, des directions poursuivent des buts opposés, contradictoires, incohérents. Il est urgent de définir une véritable stratégie en Europe !

Voici deux exemples éclairants :

1- Sur les infrastrastructures de Place européennes

Par infrastructures de Place, je parle des bourses, des plates-formes de compensation de titres ou de paiements, des cartes bancaires …

D’un côté la DG Marché intérieur (Charlie McCreevy) oeuvre pour une Europe forte et efficace pour faire fonctionner les services communs aux Etats membres, bénéficiant d’économie d’échelle,  afin d’avoir une véritable bourse européenne plutôt qu’un morcellement de bourses avec des redondances, une plate-forme générale pour la compensation des paiements, des virements, des paiements électroniques ou des cartes bancaires.

De l’autre côté la DG de la concurrence (Nelly Kroes), sous la pression des lobbies anglo-saxons, s’accroche au dogme dictatorial de la concurrence, tuant dans l’oeuf les initiatives de fusion, de rapprochement d’entreprises européennes ou la création de nouveaux services qui risqueraient d’avoir une position monopolistique. Appliquant ce dogme aux services communs tels que les bourses, les chambres de compensation, ces services « publics » (même si non nationalisés), communs aux Etats membres, elle empêche l’Europe de se doter d’outils et d’infrastructure forts et compétitifs.

Aujourd’hui, on se trouve devant des infrastructures boursières qui se font concurrences en Europe et faute d’être arrivé à conclure avec EUREX, Euronext a fusionné avec le NYSE, bourse américaine. LCH-Clearnet pour la compensation a un projet de fusion avec la DTCC américaine.

Il faut savoir que la plateforme centralisant les ordres européens passant aujourd’hui par Euronext sera aux Etats-Unis et que la structure holding étant établie aux Etats-Unis,c’est la loi américaine qui s’applique. Si les Etats-unis décident d’embargos sur des valeurs qui y sont négociées ou compensées ou sur des acteurs financiers clients de ces structures, l’Europe peut être fortement contrainte voire asphyxiée.

Dans la continuité de la fusion de ces bourses, notons le projet de fusion DTCC/LCH-Clearnet avec aussi des enjeux stratégiques sous-jacents : localisation physique de la plateforme de clearing aux Etats-Unis, sous une société de droit américain qui donc peut être soumise aux critères d’embargo ou de surveillance imposés par la loi américaine sur les valeurs qui y sont traitées ou les acteurs qui y opèrent.

Et même si l’Europe a une volonté politique et demande à la Commission concurrence de se mettre en veille sur des sujets stratégiques, ce n’est pas facile car les bourses ne sont plus des entreprises publiques. Les décisions ne peuvent pas se prendre uniquement par les Etats mais avec les actionnaires et la profession.

 

Autre exemple : celui de la compensation des paiements par cartes bancaires. Face aux géants américains VISA et Mastercard, il y avait encore un acteur européen, Carte Bleue. Les banques européennes ont entre elles un accord, pour que dans le cadre de retrait d’espèces par carte au DAB d’une autre banque que celle du client détenteur de la carte, la banque de ce client dédommage la banque détenant le DAB (subissant le coût d’entretien et de réapprovisionnement du DAB) d’une commission interbancaire (charge ensuite aux banques de répercuter le coût du service au client). Cette commission est gérée par le système de Place carte bleue. La DG concurrence n’y est pas favorable car elle considère une telle disposition comme relevant d’un cartel, d’une entente tarifaire entre les banques, contraire aux principes de concurrence et risque de l’interdire, compliquant la gestion du dispositif. Moralité, les banques européennes ont préféré laisser tomber le GIE Carte bleu, qui a été racheté par VISA. Et maintenant la DG Marché Interieur panique de voir que l’Europe n’a plus de structure en propre sur les cartes bancaires et a demandé aux banques d’en recréer une !!!

Le résultat de cette politique étant que ce sont souvent les américains (et pourquoi pas bientôt les Chinois !) qui reprennent des entreprises européennes.

De tels services publiques stratégiques devraient avoir une structure de type mutualiste (les actionnaires sont les clients, les banques européennes, comme ABE sur le clearing des paiements en euro) et une gouvernance impliquant les autorités européennes (sous contrôle du Parlement européen ?).

On a trop tendance à considérer ces infrastructures comme de la « tuyauterie » et uniquement sur une problématique industrielle d’amortissement de coûts d’investissement, de retour sur investissement exigés par des actionnaires (intérêts privés) de ces structures. Or il s’agit bien d’un enjeu stratégique et politique, pas seulement de questions commerciales privées. La bourse est un « service public ».

2- Sur les services d’investissement et de paiement

D’un côté la DG de la concurrence fait tout pour que de nouveaux acteurs fassent concurrence aux banques, que ce soit sur les services d’investissement (négociation/compensation de titres) ou les services de paiement (virements transfrontières, paiements par carte bancaire, paiements électronique). Elle encourage les nouveaux entrants qui font leur apparition dans le domaine des cartes et du crédit à la consommation (grande distribution), des opérateurs de transferts d’argent ayant initialement une activité postale (Western Union,…), opérateurs d’accès Internet ou opérateurs téléphoniques (développement des e-payments avec débit sur facture de l’opérateur notamment). Ainsi, ces nouveaux entrants bénéficient d’une autorisation d’exercice sur des activités de paiement et même de crédit sans pour autant être des banques, sous des conditions bien plus légères en termes de réglementation. La Directive européenne sur les Services de Paiements, dont la transposition doit être effective d’ici novembre 2009, en fixe les termes.

Ainsi on risque de développer de façon inconsidérée le crédit à la consommation et le surendettement auprès de populations fragiles, dans la même logique que ce qui s’estdéveloppé aux Etats-Unis (2500 milliards de dollars d’encours de crédit à la consommation par cartes bancaires, objets ensuite de titrisation et de revente toxique dans des fonds, … qui risquent de nous exploser à la figure comme les subprimes sur l’immobilier !). Ces entreprises n’étant pas soumises aux mêmes contraintes de fonds propres et de surveillance que les banques et n’étant pas des professionnels du risque. C’est une nouvelle bulle que nous a préparée la Commission européenne, alors qu’en même temps la crise nous appelle à revenir vers plus d’orthodoxie, vers un besoin de sécurisation.

 

Ces exemples démontrent qu’il est temps d’avoir une véritable stratégie européenne, ainsi qu’une réelle gouvernance économique, avec une vision globale cohérente, des objectifs clairs et coordonnés.

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Des partis européens pour re-construire l’Europe

Parlement Europeen Strasbourg.jpgLe non irlandais au referendum de ratification du traité de Lisbonne, de même que le non français au précédent referendum sur le traité de Constitution Européenne, sont symptomatiques de la méfiance des citoyens européens.  Les citoyens européens ont l’impression que l’Europe se fait sans eux, voire contre eux. Les sondages le prouvent, les discussions de quartier, de commerce, de famille, le confirment, la volonté qu’ont manifestée des gouvernements d’éviter autant que possible le referendum pour la dernière ratification du nouveau traité, qui de surcroît n’est pas à la portée d’un peuple car trop technique et trop complexe, en est l’évidente justification.

 

Il est intéressant de noter et d’analyser toutes les réactions publiées par la presse et les médias de la scène politique française et Européenne :

 

          Il y a ceux qui baissent les bras et pensent ce c’en est fini de l’Europe,

 

          ceux qui espèrent refaire voter les Irlandais après avoir monté une opération de pédagogie, d’explications, de négociations,

 

          et ceux qui proposent une Europe à deux vitesses : celle des pays qui ont ratifié et exercent entre eux le nouveau mode de fonctionnement,
et les autres, dans un 2ème cercle, un peu comme les pays de l’Union qui sont dans l’Euro et ceux qui ne le sont pas. Mais je n’ai pas compris comment cela pourrait fonctionner, notamment pour les votes (Irlande exclue du vote à majorité qualifiée ? Les lois votées ne seraient pas appliquées à l’Irlande si elle pose un véto ? Le haut représentant pour la politique étrangère et de la sécurité commune ne parlerait pas pour l’Irlande ? …).

 

Nuls de ceux-là n’expliquent la cause profonde du non et proposent d’y répondre, sauf François Bayrou. Il est le seul à exprimer ce simple et évident constat et appeler à une véritable re-construction de l’Europe, avec et non sans les citoyens. 
 
L’Europe devrait être un facteur d’augmentation de la puissance et de la souveraineté de ses pays et de ses peuples au sein de la  mondialisation et face aux grandes puissances que sont les Etats-Unis, la Russie, la Chine, l’Inde, le Japon. Elle devrait contribuer à une meilleure croissance économique de ses pays réunis, mais ne pas se limiter au commerce et à l’économie. L’Europe se doit de défendre et protéger des valeurs communes, un patrimoine culturel commun, un projet social et des valeurs de solidarité, tout en respectant la diversité des identités et des cultures, offrir au monde un modèle de société exemplaire et s’affirmer comme une puissance  incontournable dans ce nouveau monde multipolaire. L’Europe devrait aussi être proche de ses citoyens, les informer régulièrement et prendre leur avis par les députés qu’ils ont élus et aussi par la presse nationale. Or cela ne fonctionne actuellement pas comme cela.
Comment recréer le lien entre les citoyens européens et leurs institutions et comment re-construire le projet Européen ?

D’après François Bayrou, il y a deux manières de recréer le lien entre les citoyens et l’Europe : la transparence et l’information par voie de presse. Il avait proposé que les journaux informent à fréquence hebdomadaire des sujets discutés au sein des institutions européennes, au Parlement et à la Commission de Bruxelles. Et aussi que les députés européens assurent un lien régulier avec leurs électeurs.

 Dans ce contexte, les élections européennes qui auront lieu en juin prochain vont cristalliser toutes les rancoeurs des citoyens et c’est justement là qu’il faudra répondre à leurs attentes, leur expliquer en termes simples l’actuel fonctionnement de l’Europe, ce qui marche bien et ce qui fait défaut, leur proposer un projet clair qui définisse les valeurs qui gouvernent la société européenne, qui soit un projet de société pas seulement économique mais également solidaire, durable et désirable, qui réponde à la fois à leur besoin d’assurance sur la sauvegarde de leur identité, sur le respect de la démocratie, leur besoin de prise en compte de leur opinion de citoyen et du devoir d’information à leur égard.Ces élections seront donc capitales et la campagne sera une occasion non pas simplement de luttes de pouvoirs entre clans politiques, décomptant les députés de chaque clan, mais une rencontre importante entre les représentants du peuple et le peuple pour remettre les compteurs à zéro, rebattre les cartes, s’expliquer, sur le fond.

 Sur la scène nationale, on n’entend parler que des partis nationaux qui devront présenter des listes (UMP, PS, MoDem, Les Verts, …). Or, au Parlement Européen, les partis nationaux auxquels appartiennent (en général) les députés européens, sont pour certains affilés à un parti européen, lui-même inscrit dans un groupe parlementaire au Parlement, afin de s’organiser efficacement selon des courants politiques défendant des positions communes répondant à une convergence de valeurs, de projet, d’appréciation d’efficacité politique de moyens d’actions.

Ces élections doivent ainsi s’inscrire dans un projet européen défendu par des partis européens. En effet, cela paraît bien étriqué de mener une campagne européenne en France uniquement au nom de partis nationaux. Dans la mesure où les partis nationaux s’inscrivent dans une démarche commune d’un parti européen, d’un groupe parlementaire européen, il est logique de présenter un projet européen défendu au niveau européen par le groupe parlementaire, dont les partis nationaux sont les porte-parole vis-à-vis des citoyens dans chacun des pays européens. 
 
Aussi est-il intéressant de s’interroger sur l’existence de ces partis européens,  la manière dont ils fonctionnent,  leur lien avec les partis nationaux. Les Français et de manière générale les citoyens européens sont très peu informés de l’existence et des actions de ces partis européens. Et pourtant il en existe et l’Union Européenne consacre même un budget de 8,4 millions d’euros par an à leur fonctionnement.

 

Des partis européens pour représenter les citoyens européens

 Les partis politiques européens ont une existence légale depuis le 4 novembre 2003 date à laquelle une loi européenne a été adoptée pour réglementer la création et le financement des partis politiques au niveau européen.

 

Il s’agit donc d’une avancée démocratique notable, car les partis politiques sont un facteur d’intégration important. Ils contribuent à la formation d’une conscience européenne et à l’expression de la volonté politique des citoyens.

 

Dans le cadre du processus d’intégration européenne, les plus importantes familles politiques ont fondé, au cours des années soixante-dix, des fédérations de partis au niveau européen, qui se composent des partis nationaux se rattachant à une même sensibilité politique.

 

 

Quelles sont les conditions pour la création d’un parti européen ?

 Un parti politique européen (qui peut être un seul et unique parti politique ou une alliance de partis politiques) doit être enregistré auprès du Parlement Européen et doit satisfaire un certain nombre de critères : 
 
avoir la personnalité juridique dans l’Etat membre où il a son siègeou bien avoir obtenu au moins 3 % des voix exprimées dans, au moins, un quart des Etats membres lors des dernières élections européennes

respecter, dans son programme et par son action, les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l’État de droit

 

Un citoyen européen ne peut pas adhérer directement à un parti européen  puisqu’il s’agit d’une fédération de partis. Cependant il est légitime de penser qu’on pourrait faire évoluer ce dispositif pour le rendre plus proche des citoyens, avec une adhésion directe. Il faut y réfléchir …

 

 

Quels sont les partis et groupes politiques au Parlement Européen ?

 

Le Parlement est organisé en groupes politiques : les députés ne se regroupent pas par délégations nationales mais par affinité politique en fonction des partis nationaux auxquels ils appartiennent.

 

Le Parti Populaire Européen (PPE), auquel est affiliée l’UMP, est le parti situé plutôt « à droite » selon les critères habituels en France, se qualifiant de chrétien-démocrate-conservateur. Il est le groupe parlementaire le plus important numériquement (264 des 732 sièges). Il s’est ouvert à des formations politiques eurosceptiques (telles que les conservateurs britanniques ou les membres de Forza Italia).

Le Parti Socialiste Européen (PSE) regroupe les partis socialistes, sociaux-démocrates et travaillistes d’Europe. Deuxième groupe politique au Parlement européen après les élections de 2004 (215 députés en février 2008), c’est également le principal parti de l’opposition au Parlement européen. Issu de la gauche gouvernementale réformiste, ses alliés traditionnels sont les Verts européens. Selon la tradition européenne, il peut participer à des majorités de circonstance avec des partis du centre ou de droite. Il demeure cependant distant vis-à-vis des communistes et ex-communistes de la Gauche européenne. Le PSE est lié à l’Internationale socialiste.

L’Alliance des Démocrates et des Libéraux pour l’Europe (ADLE) est le troisième groupe politique d’importance au Parlement européen, avec 106 députés issus de 21 pays. Il regroupe le Parti Démocrate Européen (PDE) et le Parti Européen des Libéraux, Démocrates et Réformateurs (ALDR). Les Démocrates partagent avec les Libéraux une conception commune de l’Europe (institutions démocratiques, fédéralisme, protection des identités) mais divergent généralement sur les questions économiques et de société.

 

Le Parti démocrate européen, auquel est affilié le parti français le Mouvement Démocrate, est un parti politique européen du centre, initié le 16 avril 2004 par le Français François Bayrou et l’Italien Francesco Rutelli qui sont ses deux premiers co-présidents.Politiquement, il se situe entre le Parti des socialistes européens (PSE) et le Parti populaire européen (PPE, droite). Il compte 26 députés.

Parmi les points principaux de son programme, citons :

  1. l’exigence d’institutions plus démocratiques, mettant les citoyens et non les technocrates au centre du projet européen ;
  2. l’idée que l’Europe doit parler d’une seule voix dans le monde, développer une politique de défense et de sécurité commune, et défendre le multilatéralisme dans les relations internationales ;
  3. la défense du modèle social européen, qui garantit la libre concurrence mais agit activement pour combattre ses excès et préserver les services publics qui ne peuvent être abandonnés aux seules force du marché ;
  4. l’investissement massif dans l’éducation et la recherche pour reconquérir le niveau d’excellence en matière d’enseignement supérieur dont l’Europe a besoin pour être à la pointe de l’innovation ;
  5. la défense des identités nationales, régionales et locales, et la promotion de la diversité culturelle et linguistique.  

Et au-delà de l’Europe, des partis mondiaux ?

Ces alliances ne se limitent pas au niveau européen, en tout cas pour les démocrates. Le Mouvement Démocrate a des liens non seulement en Europe, mais également en Inde avec les Démocrates engagés et réformateurs et aux Etats-Unis avec le Parti Démocrate. Il a créé fin février 2006 avec la New democrat coalition américaine, composante parlementaire du Parti démocrate, une Alliance mondiale des Démocrates.

L’Alliance mondiale des Démocrates (AMD) est une structure internationale rassemblant à travers le monde les partis ayant en partage un projet politique commun fondé sur l’idée d’une économie efficace au service de la cohésion sociale et du progrès partagé. Il a été fondé en février 2005 par le Parti démocrate européen et la New Democrat Coalition du Parti démocrate américain, lors d’une convention tenue à Rome. Il s’est depuis doté d’une solide structure organisationnelle avec notamment des bureaux à Bruxelles et Washington, DC.L’AMD unit les partis ayant en commun une culture du réformisme politique, généralement appelée “démocrate” ou “humaniste”, c’est-à-dire un mélange de social-démocratie, personnalisme et christianisme social.
Il se définit comme portant un grand projet de société qui ne soit “ni socialiste, ni conservateur” (et également différent du projet de l’internationale libérale), mettant l’accent sur la responsabilité individuelle et la solidarité collective.
 

 

Construisons l’Europe et menons campagne au niveau européen !

Même si ce réseau, ces connexions internationales politiques, sont peu connues du grand public et peu relayées par la presse et les médias, elles montrent que la mondialisation s’étend aussi aux partis politiques, qu’un projet de société ne peut de construire uniquement au sein d’un pays ni en Europe ou dans le monde par une action limitée à un parti national. Ce sera un des enjeux de cette nouvelle campagne. Rapprochons-nous de nos amis européens pour faire campagne ensemble et proposer un projet européen qui soit celui des citoyens démocrates européens !

 

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